Cumul des sanctions fiscales et pénales : Nouvelle question prioritaire de constitutionnalité ?

Le Conseil constitutionnel vient à nouveau d’être saisi, le 19 mai dernier, d’une question prioritaire de constitutionnalité au sujet du cumul de sanctions fiscales et pénales.

Pour rappel, la question prioritaire de constitutionnalité (QPC) permet à toute personne, lors d’une instance en cours devant une juridiction, de contester la constitutionnalité d’une disposition législative, applicable au litige, au motif qu’elle porterait atteinte aux droits et libertés que la constitution garantit. Le Conseil constitutionnel peut alors être saisi de cette question sur renvoi du Conseil d’Etat ou de la Cour de cassation.

Le 30 mars dernier, la chambre criminelle de la Cour de cassation avait doublement saisi le Conseil constitutionnel d’une telle question dans les affaires Cahuzac et Wildenstein dans lesquelles les protagonistes, dont l’ancien ministre du budget, sont poursuivis pour fraude fiscale.

Dans ces deux affaires, il s’agira pour le Conseil constitutionnel de se prononcer sur la constitutionnalité du cumul des sanctions fiscales pour insuffisance de déclaration (article 1729 du CGI) et des sanctions pénales pour fraude fiscale (article 1741 du CGI) au regard du principe constitutionnel de nécessité des délits et des peines (« non bis in idem ») découlant de l’article 8 de la Déclaration des droits et de l’homme et du citoyen.

L’audience relative à ces deux QPC doit se dérouler le 6 juin prochain et la décision des Sages est attendue dans le courant du mois de juin.

Mais, alors que les QPC Cahuzac et Wildenstein concernent des impôts (droits de successions et ISF) dont la compétence revient au juge judiciaire, la QPC déposée le 19 mai dernier concerne la TVA et l’impôt sur les sociétés, impôts réservés à la compétence des juridictions administratives.

Or, le Conseil constitutionnel, pour l’application du principe « non bis in idem » a fixé, dans sa décision du 18 mars 2015, plusieurs critères dont l’identité d’ordre de juridiction, critère qui est rempli dans le cas des QPC Cahuzac et Wildenstein, puisque les poursuites pour fraude fiscale relèvent également de la compétence du juge judiciaire, mais qui ne l’est pas dans cette dernière QPC.

Alors que, jusqu’à présent, la chambre criminelle de la Cour de cassation refusait de transmettre au Conseil constitutionnel des questions similaires, elle a finalement franchi le pas, le 19 mai dernier, en passant outre le critère de l’identité de juridiction au motif du respect du principe de l’égalité devant la justice.

Quelle serait la portée d’une décision du Conseil constitutionnel déclarant inconstitutionnel le cumul des sanctions pénales et fiscales ?

Concrètement, la décision pourrait s’appliquer à tous les justiciables ayant des instances en cours mettant en jeu lesdites dispositions et leur permettrait de ne plus se voir appliquer une double sanction pécuniaire au titre des articles 1729 et 1741 du CGI.

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